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Fantômes et revenants au moyen-âge…

Cet article sera le premier d’une série, consacrée à des livres que j’apprécie, et dont je vous ferai le compte rendu total, ou partiel. Aujourd’hui, je vous propose la partie 3 de l’ouvrage d’un auteur que j’apprécie particulièrement : »Fantômes et revenants au moyen-âge » de Claude Lecouteux.

J’ai choisi de me concentrer sur la partie du livre qui donne des informations sur le mode de pensée de nos ancêtres, et qui peut nous permettre d’avoir un regard neuf  et plus éclairé sur certains contes, et certaines légendes.

Fantomesetrevenants

Troisième partie

Chapitre 1 : Les revenants, la mort, l’au-delà

Les revenants sont des personnages gênants, parce qu’ils transgressent les lois naturelles, et qu’ils remettent en cause le partage simple du monde des morts, et du monde des vivants. Ils sont agissants parmi les vivants, en étant pourtant morts.

L’outre tombe

Les textes norrois connaissent trois royaumes des morts : celui de Ran, déesse de la mer dont nous ne savons presque rien. Celui de Hel déesse des enfers, et celui d’Odin, la Valhöll.

Dans Hel, les défunts mènent une vie misérable. Ce royaume semble réservé aux morts du commun, et qui ne sont pas tombés les armes à la main.

La Valhöll à pour habitants les « guerriers uniques », l’élite. Odin choisit chaque jour les héros morts au combat. Les guerriers du Valhöll passent leurs journées à se battre, à boire et manger. Jusqu’au Ragnarök où ils se battront au côté des Dieux pour la bataille ultime.

D’un autre côté, les sagas proposent la croyance en un autre monde, qui est le tombeau sous le tertre, ou par extrapolation, sous la montagne. Ainsi, il existe un lien fort entre l’au-delà et la montagne. A leur mort, les défunts rejoignent les autres morts dans la montagne. Dans la montagne, il y a des feux, les cornes s’entrechoquent, et l’on entend des cris. L’autre-monde semble être l’exacte reflet de l’ ici-bas. Beaucoup de contes et légendes médiévales se font l’ échos de ces croyances.

La montagne est l’intermédiaire entre les hommes et le monde des Dieux. Elle à également un caractère sacré en étant souvent la résidence des Dieux. A partir du XII e siècle, la montagne  devient le séjour des fées et des démons (en raison de son caractère païen), et plus tard, les sorcières y tiendront leur sabbat. Les païens y construisent leurs temples. La montagne est un lieu de rencontre entre les humains et le sacré.

Coexistence de deux visions

L’au-delà mythique s’oppose à un autre monde qui est celui de la tombe et de la montagne. C’est à dire que ce heurte des conceptions savantes et une opinion populaire, coexistant entre le IXe et le XII e siècle. Le première s’efface peu à peu devant la seconde par l’usure du temps, l’évolution historique et la christianisation.

La mort

Les germains ont, au témoignage des écrits scandinaves, conçu une cosmogonie dynamique : un mouvement perpétuel anime le monde et entraîne les hommes et les choses ; tout s’inscrit dans un cercle parfait englobant le visible et l’invisible, les humains et les Dieux, le réel et le possible, le passé, le présent et l’avenir. Est-ce un hasard si les trois Nornes, les Parques nordiques, se nomment passé, présent, et avenir ? Une circulation permanente s’opère d’un univers à l’autre, et il n’existe pas de frontières définies entre la vie et le trépas.

Le trépas n’est qu’une étape du cycle. A tout moment, le monde des morts peut s’ouvrir, et donner lieu à des retours. Les mort, sont donc vivants. Dans l’autre monde, ils vivent une vie semblable à leur vie terrestre. Et leur vie se déroule dans les tertres. Au XIXe siècle, les paysans Suédois déposaient dans le cercueil la pipe et le couteau du mort, avec parfois de l’eau de vie.

Mais qu’est ce qui anime les revenants, ces cadavres vivants ?

 Chapitre 2 : L’âme

Dans les pays Germaniques, le nom est important, il est porteur de sens. Il peut apporter des qualités aussi bien négatives que positives. Une coutume appelée Nafnfestr consistait en le don du nom d’un ancêtre récemment décédé au dixième jours de vie d’un nouveau né. Cela à fait dire à certains que les anciens Germains croyaient en la métempsychose, la réincarnation des âmes, puisque les qualités du défunt étaient censées être transmise au nouveau né par le nom.

En Norrois, l’âme recouvre trois réalités distinctes, exprimées par trois mots : Fylgja, Hugr, et Hamr.

Fylgja : C’est la part de l’âme qui « suit » . Le double de l’individu, qui peut prendre la forme d’une femme ou d’un animal qui protège la famille ou l’individu qui l’on adopté. La Fylgja se manifeste surtout pendant le sommeil, et à pour fonctions principales la protection et la divination. Voir son esprit tutélaire (Fylgja) éveillé, est signe de mort prochaine. La Fylgja est une émanation de l’autre monde avec qui la communication est possible puisqu’il n’existe pas de véritable frontière entre ces deux réalités.

Hugr : Le Hugr, esprit, humeur, pensée, correspond au latin animus, ou spiritus. Il est dynamique et peut être envoyé par la personne qui le possède. Il est agissant, mouvant. Le Hugr peut agir à distance en prenant une forme, le Hamr.

Hamr : Hamr, la peau. « Il est dit qu’Odin peut prendre plusieurs forme, et voyager au loin ». Ces formes externes (Hamr) sont liées à la forme interne d’un individu (Hugr), et certains, peuvent posséder plusieurs de ces Hamr. Il s’agit d’une forme interne qui va au loin alors que l’homme tombe en léthargie, et qui peut être agissante. Nous ne sommes pas loin ici du phénomène chamanique. Le hamr et le corps physique sont liés, malgré la distance, si bien que s’il arrive quelque chose à l’un d’entre eux, il arrive l’équivalent à l’autre. Le Hamr peut prendre une forme différente du corps physique et avoir son autonomie.

Ainsi l’âme de l’homme (Fylgja, Hamr, Hugr) montre la porosité et le lien que l’Homme païen entretenait avec l’autre monde. Une des clés de compréhension de ceci est le Hamr, la force, la puissance qui nous habite, et qu’il est possible d’envoyer au loin pour agir. Il est bien dit d’ailleurs que cette capacité de projection du Hamr peut être plus ou moins acquise…

L’animation du cadavre

Nous pourrions donc tirer la conclusion que les revenants sont mus par le Hamr. Dans les pays Germaniques, ceux-ci peuvent être lourds, avoir une forme, voyager au loin, s’incorporer à la terre, et traverser la matière, et ont souvent une force supérieure qu’ils n’avaient de leur vivant. Le fait de détruire le corps pour mettre fin aux malfaisances des revenants montre que le Hamr et le corps physique sont liés. Le Hamr à besoin d’un support physique pour exister. Tous les morts ne sont pas des revenants parce qu’ils ne disposent pas tous de leur Hamr, ce qui pourrait être l’apanage des sorciers, magiciens, devins et voyants… Ainsi, l’homme ne serait pas limité par son corps, même au delà de la mort.

Chapitre 3 : Morts, revenants et troisième fonction

Chez les peuples germaniques, les morts sont liés à la fécondité, la fertilité du sol. Ainsi un bon mort, c’est à dire quelqu’un qui sera mort dans des circonstances normales rejoindra le monde des ancêtre, et veillera sur le clan ou la famille. Le lien sera maintenu par des rituels participants du principe de don contre don. Je te donne des offrandes, des sacrifices, tu m’accorde paix et abondance de la terre…

Le bon mort, et sa transformation en bon génie.

Certains mythes scandinaves nous racontent précisément comment à prit place le culte des ancêtres afin de préserver l’abondance des récoltes et la paix. Ainsi, un roi mort est placé dans un tertre auprès duquel seront toujours payés les impôts (offrandes)… Le roi avait la réputation de permettre à son royaume la paix et l’abondance. En poursuivant les offrandes, l’abondance et la paix restent sur le royaume, même après la mort de ce roi bien heureux… (Le caractère royal de ces rituels rappel le principe de redistribution des rois Celtes…)

Dans un autre exemple, à la mort d’un roi prospère, chaque partie du royaume réclame une partie de ce corps, afin de toujours profiter de cette abondance. Ainsi, ce roi est coupé en quatre, chaque morceau étant mis dans un tertre au quatre coins du royaume. Il est dit qu’ensuite, beaucoup de gens venaient faire des sacrifices en ces lieux…

Certains tertres, dans les mythes restent toujours verts…

Les ancêtres sont également liés aux éléments, et lorsque des tempêtes se lèvent, elles sont mises en rapport avec la manifestation d’un mort. Ainsi, si les morts peuvent agir sur les éléments, ils sont liés à la fertilité du sol, au bien être du bétail.

Le « Bon mort » rejoint les ancêtres dans la montagne ou ailleurs, et devient génie tutélaire, génie de la montagne, et garantira l’abondance.

Néanmoins, tous les génies tutélaires ne sont pas des morts. Il existe des esprits des lieux, Alfr, nains et géants, des habitants des pierres, des bosquets, des sources et des montagnes. La christianisation des mythes et légendes de nos pagus à brouillée les pistes, et il est parfois difficile de savoir qui se cache dans tel ou tel lieu : défunt ou esprit du lieu…

Les mauvais revenants

Là où sévit un revenant, les bêtes meurent, le désert s’ installe, la terre ne donne plus de fruits, il tue les hommes et s’en prend aux animaux. De par leur caractère nuisible, et avec l’aide du christianisme, les défunts deviennent des trolls, terme qui, à l’origine désigne les géants, puis des lutins, et enfin des démons. Les clercs ont systématisé la suppression du terme « revenant » par celui de « troll ». Les histoires ne concernent donc plus que le combat d’un homme avec le démon…

Plus nous poussons l’enquête, plus il devient évident qu’il y a un lien dans la pensée ancienne entre les défunts et la troisième fonction, qui concerne le bétail et les récolte, mais aussi la paix, sans quoi il ne peut y avoir ni récoltes, ni bien être…

Fin de la troisième partie

Ce livre de Lecouteux est plein de pépites. J’espère que j’aurais été capable d’ en retranscrire l’essentiel, le livre étant dense en informations. Si vous avez trouvé ce résumé utile n’hésitez pas à le partager, et à le commenter ci-dessous.

Witto

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